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Société des Missions Africaines de Strasbourg
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La Société des Missions Africaines (SMA) est une communauté de missionnaires catholiques venant des cinq continents. Elle est présente en Afrique depuis 150 ans.

La SMA mène diverses actions en faveur de la santé, de la condition féminine et de l’éducation.

Le prêtre selon Mgr de Brésillac
Article mis en ligne le 10 juin 2016
dernière modification le 26 juillet 2020

par Bernardin Kinnoume

2e partie (suite du n° 1/2016 page 3 à 7)

Le prêtre est appelé et envoyé à la vigne du Seigneur.

Disciple du Christ, le prêtre est appelé et envoyé à la vigne du Seigneur (Marc 12, 1-12.), ou encore comme intendant de la maison et des biens du Seigneur (Luc 12, 42-43.). « Que nous dira le Maitre de la vigne s’il la trouve mal cultivée, sous prétexte que nous ne trouvions pas de temps pour cela, tandis que nous en avions pour d’autres choses inutiles [1]. »

Il n’est pas le seigneur de la vigne ni le maître de la maison. Son devoir est d’être à l’œuvre. « Il faut que nous les traitions comme Jésus-Christ nous a traités par le ministère de ceux qui furent nos guides et nos pasteurs. A notre tour, nous devons les nourrir de la pure doctrine de l’Évangile, les conduire avec prudence dans les voies du salut. Nous devons être pour elles des maîtres pleins de douceur, des médecins dans leurs maladies, des pères et des amis dans toutes les phases de leur vie [2]. »

Le prêtre est un serviteur fidèle qui ne fait qu’obéir au commandement du maître. « Quel immense trésor de mérites nous aurions acquis si toutes nos œuvres avaient été accomplies dans une parfaite fidélité à la grâce, par imitation de Jésus-Christ, par dépendance de Jésus-Christ, en union avec Jésus-Christ. Cum Christo, per Christum, in Christo [3]. » Il est attentif à tous les âges et à toutes les couches sociales sans discrimination. « Au milieu des petits enfants, nous agirons sur les cœurs, et nous préparerons une génération meilleure dans l’avenir en imbibant leur âme dans la sainte doctrine, et en guidant leur inexpérience à l’époque dangereuse de leur émancipation. Dans l’exercice des vertus journalières, nous serons le sel de la terre et la lumière du monde [4]. » Ce serviteur qu’est le prêtre est un serviteur fidèle qui est heureux d’être à sa place, où le Seigneur l’appelle et l’envoie. « Et si nous le servons de tout cœur, si nous le servons jusqu’à la fin, notre père qui est dans les Cieux, et qui est aussi son Père, nous glorifiera éternellement dans l’autre vie [5]. »

Le prêtre est un bon Pasteur.

En essayant d’être un autre Jésus Christ, le prêtre doit s’évertuer à être un bon pasteur comme Jésus Christ. Comme lui, il doit se donner et se sacrifier pour les chrétiens même s’ils lui sont hostiles et prendre soin d’eux. « Nos chrétiens, fussent-ils ingrats comme les habitants de Galilée, nous leur devons tous nos soins. Ils sont nos frères et Dieu nous demandera compte de leur âme. S’ils se perdaient par notre faute Dieu nous demanderait : « Qu’as-tu fait de ton frère ? » [6] Le prêtre ne peut choisir d’être un bon pasteur mais il doit l’être. « Nous sommes donc pasteurs, et non seulement nous devons, autant qu’il est en nous, en remplir les fonctions, mais nous étudier aussi à en avoir le caractère. C’est surtout sur ce point, que j’appelle en ce moment notre attention. Sommes-nous revêtus des qualités du bon pasteur ? Pouvons-nous dire : Ego sum pastor bonus ? (Jean 10, 11.) Or, le caractère du bon pasteur consiste surtout dans la douceur, la patience, l’amitié, même pour ses brebis ingrates et rebelles : Caritatem, patientiam, mansuetudinem (1 Timothée 6, 11.) [7]. Ces trois qualités (douceur, patience et charité) doivent constituer le bagage missionnaire de tout prêtre [8].


La douceur

« Heureux les doux, ils auront la terre en héritage (Matthieu 5, 4.). »

La première qualité du bon pasteur est la douceur. Le doux bon pasteur a de la place pour tout le monde dans son cœur, surtout les pécheurs et même les ennemis ; et il est miséricordieux. Le prêtre est comme le Christ, qui a un « cœur doux et humble ». « Voyez-le à la fontaine de Samarie, prévenant une femme dont la conduite n’était guère édifiante ; voyez-le congédier la femme adultère, sans vouloir la condamner ; voyez-le souffrant que la pécheresse arrosât ses pieds de ses larmes (Luc 7, 38.). Il s’assied et mange avec les publicains et les pécheurs (Matthieu 9, 10.). Si l’envie des scribes et des pharisiens lui en fait une reproche, il leur fait répondre : Euntes autem discite quid est : Misericordiam volo, et non sacrificium. Non enim vocare justos, sed peccatores (Matthieu 9, 13.). Et malgré que ces Pharisiens soient ses ennemis jurés, il ne refuse pas de les recevoir à sa table chez Simon, l’un d’eux (Luc 14, 1s.) [9]. »

La patience

« Que tout en vous soit une prédication de patience (2 Timothée 4, 5.). »

Il est impossible de vivre son ministère et son apostolat sans la patience. Car quand un pasteur a un « esprit vif, pétulant, plein d’ardeur et d’impatience » [10], tout s’écroule autour de lui mais seulement un homme doux, tranquille, patient, un homme qui sait s’avancer doucement, s’arrêter à propos, reculer même d’un pas, quand il le faut ; sans faiblesse ni déshonneur, selon les conseils de la prudence, un homme qui sache souffrir la contradiction et même l’injure, sans qu’il ait à répandre autre chose que des bénédictions, un homme qui ne choque personne et qui ait assez de tact pour comprendre qu’aussitôt que le choc arrive, c’est au moins le temps de s’arrêter et souvent de faire un pas en arrière, et vous verrez ces montagnes de granit s’amollir au souffle de sa bienveillante parole, aux doux contact de sa patience. Quelques jours après vous passerez, elles ne seront plus. A la place, un délicieux jardin étalera sa parure de fleurs et de jeunes plantes, qui porteront des fruits dans l’avenir, pourvu que, lorsqu’un orage s’élèvera, il y ait encore à côtés d’elles un homme patient, qui les soutienne au lieu de vouloir lutter contre la tempête [11]. »

Rien de sérieux ne peut se faire dans l’impatience. Et « la patience est essentiellement persévérante et n’emploie que des moyens qui peuvent durer. Ménageons ces moyens, proportions-les à la fin que nous nous proposons et au temps que nous demande l’accomplissement de nos entreprises. Nous personnellement soyons d’ailleurs imperturbables dans les épreuves, et surtout dans celles qui froissent notre caractère naturel, notre esprit de nationalité, notre orgueil enfin, et nous serons étonnés de reconnaître que toutes ces impossibilités venaient surtout de notre défaut de patience [12]. »

« Il n’est pas un seul lieu de l’univers où l’on réussisse dans les fonctions délicates du saint ministère sans être armé d’une invincible patience. Il en faut dans l’administration de la Pénitence, pour ne jamais, absolument jamais, rebuter ni décourager le pécheur. Il en faut pour les autres Sacrements, afin d’en rendre la participation facile, agréable même, et, sans jamais cependant transiger avec les principes, aplanir le plus possible les voies du salut. Attirés alors et jamais repoussés, les fidèles iront avec joie se désaltérer à ces sources de grâce. Il en faut pour la prédication, dans laquelle, sans ménager le péché, on doit ménager avec soin le pécheur. Car la parole du pasteur est la nourriture de ses brebis. (…) Il doit s’armer de patience dans les discordes, les divisions, les procès (…) afin de les calmer sans jamais les irriter, pour les porter à s’accorder, sans jamais condamner personne. (…) Par ailleurs, il a besoin de patience avec les enfants qu’il doit instruire, avec les malheureux qu’il doit soulager, avec les vieillards dont il doit partager les ennuis, avec les malades qu’il doit visiter et consoler, avec les moribonds qu’il doit assister, avec tous enfin, malgré la diversité d’âge, d’humeur, de caractère, de position : Omnem ostendentes mansuetudinem ad omnes homines, dit saint Paul (Tite 3,2) [13]. »


La charité

« Pour l’instant, ce qui vaut c’est la foi, l’espérance et l’amour. Mais le plus grand des trois est l’amour (1 Corinthiens 13, 13.). »

Cette troisième qualité du bon pasteur est la condition pour que les deux premières puissent exister. Elle est le ciment qui rattache et solidifie les différentes qualités à la personnalité du prêtre. « Il existe un moyen de conserver toujours, au milieu de ces chrétiens imparfaits, la patience et la douceur. Il existe, mais il est unique. Ce moyen infaillible et sans lequel tous nos efforts, seront inutiles, c’est de les aimer, de les aimer quand bien même ils se rendent indignes de notre amour, de les aimer non seulement en Dieu, comme on dit, et seulement pour remplir à leur égard les conditions essentielles de la charité, mais de les affectionner et de leur témoigner cette affection dans toute rencontre. Je sais que, sur ce point, nous avons à briser la nature. Car, naturellement, l’affection n’est possible qu’entre ceux qui se ressemblent d’humeur, de caractère, d’habitudes, de mœurs [14]. »

C’est impérieux qu’en aimant ce que nous sommes, nous aimions aussi nos chrétiens malgré ce qu’ils sont. « Aimons-les. Malgré leurs défauts, leurs usages bizarres, leur mauvais caractère, aimons-les. C’est notre devoir, puisque nous sommes leurs pasteurs. Ils sont devenus nos enfants d’adoption ; soyons réellement leurs pères. Ils ont des défauts ? Mais quel est le peuple qui n’en a pas ?... Au lieu de les condamner, aimons-les ; aimons-les avec tous leurs défauts, avec toutes leurs misères. Alors seulement nous serons leurs pères et leurs pasteurs [15]. »

La joie, le zèle et le courage

Le prêtre est un autre Jésus Christ pour le peuple de Dieu aujourd’hui, il est disciple du Christ qui marche fidèlement à sa suite ; il est le serviteur qui continue l’œuvre du Maître ; il est enfin un bon pasteur. Ainsi, lui faut-il surtout apprendre à imiter et à vivre comme Jésus Christ. Entre autre, il lui faut être doux, patient et charitable. Trois qualités qui doivent être ranimées par trois vertus qui sont la joie, le zèle et le courage. « Allons (…) – disait-il - comme de vrais apôtres, pleins de joie, pleins de zèle, pleins de courage. Ces trois vertus seront la preuve que nous resterons fidèles à notre Maître, tandis qu’elles nous soutiendront dans les épreuves de notre ministère qu’elles rendront facile, doux et fructueux [16]. »

La Joie : la vraie joie est « celle qui doit être la compagne fidèle de nos travaux, c’est la joie du cœur, la joie d’une conscience pure, la joie du serviteur qui aime son maître et qui se réjouit de travailler pour lui, la joie d’une légitime vocation qui nous fait nous trouver bien là où le Seigneur nous a mis, qui n’envie rien, qui ne désire rien, qui ne regrette rien, parce qu’elle n’a plus qu’un seul désir dans le monde : faire ce que Dieu veut, comme il le veut, et plus rien [17]. »

Le Zèle : sans le zèle, le prêtre ne peut rien faire. Mgr Brésillac disait que « nos forces sont bornées, nos talents sont bornés, tous nos moyens sont bornés, mais ce qui ne doit pas avoir de bornes, c’est notre zèle. Ce zèle doit être constant, infatigable, universel [18]. »

Le Courage : « Du courage, oui, il en faut. Il en faut beaucoup, je l’avoue, pour ne pas succomber sous les attaques sans cesse répétées d’ennemis intérieurs et extérieurs qui nous harcèlent de tous côtés ; il en faut pour lutter contre le courant et avancer toujours, sans qu’on s’aperçoive quelquefois qu’on fasse un pas de plus sur la route ; il en faut pour ne point se laisser aller au dégoût quand on est seul à supporter le poids de la chaleur et du jour [19]. »

Le prêtre est un homme heureux même dans les difficultés de son ministère, un homme rempli du zèle apostolique pour la cause du Christ, un homme courageux pour marcher a la suite du grand prêtre.

Prêtre, il faut le devenir chaque jour

Le prêtre est appelé à participer à l’œuvre rédemptrice de Dieu tout en imitant le Christ qui s’est donné entièrement pour le salut de tous. Il est un autre Christ mais un disciple et un serviteur, suivant l’exemple du Bon Pasteur : patient, doux et généreux. Il doit s’armer jour après jour de la vraie joie, du zèle et du courage.