
par Jean-Marie Guillaume
Le Christ Roi de l’Univers
Première lecture
Lecture du deuxième livre de Samuel
« Ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël. » (2 S 5, 1-3)
En ces jours-là, toutes les tribus d’Israël vinrent trouver David à Hébron et lui dirent : « Vois ! Nous sommes de tes os et de ta chair. Dans le passé déjà, quand Saül était notre roi, c’est toi qui menais Israël en campagne et le ramenais, et le Seigneur t’a dit : Tu seras le berger d’Israël mon peuple, tu seras le chef d’Israël. » Ainsi, tous les anciens d’Israël vinrent trouver le roi à Hébron. Le roi David fit alliance avec eux, à Hébron, devant le Seigneur. Ils donnèrent l’onction à David pour le faire roi sur Israël.
Psaume
(Ps 121 (122), 1-2, 3-4, 5-6)
R/ Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
Quelle joie quand on m’a dit :
« Nous irons à la maison du Seigneur ! »
Maintenant notre marche prend fin
devant tes portes, Jérusalem !
Jérusalem, te voici dans tes murs :
ville où tout ensemble ne fait qu’un !
C’est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur,
là qu’Israël doit rendre grâce au nom du Seigneur.
C’est là le siège du droit,
le siège de la maison de David.
Appelez le bonheur sur Jérusalem :
« Paix à ceux qui t’aiment ! »
Deuxième lecture
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens
« Dieu nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé. » (Col 1, 12-20)
Frères,
rendez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints, dans la lumière. Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé : en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés.
Il est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles, Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui.
Il est aussi la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en tout la primauté. Car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel.
Évangile
« Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » (Lc 23, 35-43)
Acclamation :
Alléluia. Alléluia. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Béni soit le Règne qui vient, celui de David notre père. Alléluia [1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, on venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à observer. Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! » Les soldats aussi se moquaient de lui ; s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée, en disant : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! » Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! » Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu ne crains donc pas Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. » Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » Jésus lui déclara : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
Textes liturgiques © AELF
AELF
Homélie
« Il est la tête du corps, la tête de l’Église [2]. »
Ce dimanche est la fête du Christ-Roi, maître du temps, qui vient clôturer l’année liturgique. Christ est notre Roi parce qu’il a servi les siens, il les a aimés, il les a sauvés par l’offrande de sa propre vie. Ce qui est demandé à un roi, c’est de protéger son peuple, de le guider, de le sauver.
La première lecture, tirée du deuxième livre de Samuel, exprime la conviction qu’au-delà de Saül, le premier roi, c’était Dieu lui-même qui « menait Israël » et le guidait. C’est Dieu qui a ensuite choisi David. La deuxième lecture, dans un bel hymne liturgique, dit la conviction des premiers chrétiens que le Christ est la tête du corps et la tête de l’Église, qu’en lui tout est réconcilié, et qu’il a fait la paix, ce qui est le devoir du roi. Il a fait la paix, non seulement pour les humains, mais pour tous les êtres du ciel et de la terre.
L’évangile montre comment Jésus est devenu roi, par un chemin qui est à l’inverse de ce qui se passe pour les rois de la terre. Le Christ acquiert sa royauté et obtient le salut de ses sujets par la crucifixion. Le roi qui nous est montré est un Christ humilié, abandonné, bafoué, tourné en dérision, ligoté, défiguré, complètement impuissant devant l’injustice et la méchanceté des hommes. La seule personne qui peut le reconnaître comme sauveur et roi, c’est un condamné à mort, comme lui, au supplice de la croix, celui que la tradition chrétienne a désigné comme « le bon larron » : « Jésus souviens-toi de moi lorsque tu viendras inaugurer ton Règne ». On a l’impression qu’il faut être un condamné de droit commun pour reconnaître un roi dans le crucifié.
Nous vivons dans un monde difficile où la guerre, la méfiance et la peur sont le menu quotidien, où l’injustice devient criante autant sur le plan national qu’international… Les bombes et les armes ont recommencé à siffler en plusieurs endroits du monde, on essaie de renforcer la police, le contrôle, la répression, la punition. L’insécurité grandit aussi vite que grandissent les moyens de la supprimer. On ne sait pas comment faire et pourtant on est dans un monde de technique la plus sophistiquée qui ait existé… Peut-être, finalement, que l’attitude de Jésus, celle de l’amour irraisonnable, est la seule solution. L’évangile nous a habitués à ce que les professions de foi les plus justes viennent de gens qui ont pris une distance avec la religion officielle : une samaritaine, une prostituée, un centurion étranger, un larron… Tout cela aide à comprendre que le message et le chemin de Jésus s’adressent à tout homme, à tout l’homme, du plus saint en qui cependant résident des zones d’ombre jusqu’au plus misérable en qui demeurent malgré toute apparence des traces de lumière… Jésus le condamné à mort, le roi sans arme et sans armée, a été celui qui a le plus interpellé les hommes… et qui a réussi à les rassembler dans tous les endroits du monde, au-delà des frontières, des ethnies et des couches sociales, pour former des communautés de frères et de sœurs, pour les mobiliser en ce que nous appelons aujourd’hui l’humanitaire, au travail de la réconciliation et de la reconstitution de la dignité humaine.
« Il est la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en tout la primauté. Car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute la plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel. »