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Société des Missions Africaines de Strasbourg
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La Société des Missions Africaines (SMA) est une communauté de missionnaires catholiques venant des cinq continents. Elle est présente en Afrique depuis 150 ans.

La SMA mène diverses actions en faveur de la santé, de la condition féminine et de l’éducation.

Noël et la famille du Docteur Arokia Samy
Article mis en ligne le 2 février 2010
dernière modification le 26 juillet 2020

par Marcel Schneider

Arokia Samy s’est installé à la périphérie de Madras dans un environnement muticulturel, en bordure d’un chemin très passant et à proximité d’une école. Il est dentiste et il a choisi de mettre sa compétence au service des pauvres et des marginalisés.

La crèche du Dr Arokia Samy à Madras.
Photo M. Schneider

Mais Arokia ne se limite pas au simple exercice de sa profession ; il ne met pas sa foi en poche, il se sent appelé à « éduquer » le terrain, à semer la Bonne Nouvelle, le trésor qu’il a reçu dans sa famille. Le quartier comprend 1200 foyers qui se répartissent comme suit : 550 familles CSI [1], 115 familles musulmanes, 68 familles catholiques, 467 familles hindoues.

L’effet psychologique de la crèche

La fête de Noël donne au Docteur Arokia l’occasion de témoigner ouvertement et publiquement de sa foi. Avec son épouse et ses deux enfants, il crée une crèche géante en plein air, le long de sa clinique dentaire. Une merveille ! En 2007 la crèche lui a valu les honneurs du journal. L’année dernière, je n’ai pas voulu manquer l’occasion de décrypter le message de Noël destiné aux passants, aux clients et aux curieux. Avec ma peau, j’étais l’intrus au milieu des visiteurs. Arokia me cible et vient m’expliquer la leçon de catéchèse qu’il veut délivrer en ce Noël 2008.

La crèche du Dr Arokia Samy à Madras.
Photo M. Schneider

Il veut toucher la vie des gens. La crèche crée un événement dans sa rue et elle ouvre dans leur vie une parenthèse qui fait oublier les soucis du quotidien. Elle se propose d’être une halte sur leur chemin pour un moment de contemplation. Le dialogue vient féconder la rencontre et enrichit l’esprit des gens. De plus, la crèche veut être une parade. La croissance soutenue de l’économie indienne ouvre des perspectives d’enrichissement non négligeables. L’argent commence à séduire. Un esprit de cupidité se fait jour. L’Indien sera confronté à l’écartèlement entre Dieu et Mammon. Dans ce contexte, la crèche vient donner à la spiritualité une nouvelle impulsion pour résister à la tentation de la course à l’argent.

La nouveauté : Dieu crée…

Voilà une nouvelle inédite pour le monde hindou. L’idée d’une création de l’homme n’a jamais traversé les dieux majeurs, Brahma, Shiva, Vishnu, qui composent la trinité hindoue, « la Trimurti ». Le couple primitif Adam et Eve fait sensation et fait réfléchir. Il suscite des questions. Ils sont sortis des mains de Dieu et se retrouvent dans un environnement luxuriant. Ce Dieu crée à profusion. La famille Arokia prend plaisir à l’expliquer aux jeunes qui s’agglutinent autour de cette grande énigme. Chose curieuse, les jeunes reviennent avec leurs parents et leur font découvrir la nouveauté chrétienne.

La nouveauté : Dieu libère…

Le tableau met en lumière le temps de l’esclavage du peuple hébreu en pays d’Egypte. N’est-ce pas une façon de rappeler la réalité de l’exploitation des hommes ? La scène vient conscientiser le spectateur que toute exploitation est un mal, celle des enfants plus que toute autre. Le child labour [2] est en voie de disparition. Depuis 2005, la loi interdit d’utiliser les petits dans les usines pour tout travail dangereux, avec l’espoir de mettre fin à ce fléau en deux ans. Dans le contexte biblique, Dieu a pris l’option d’envoyer un libérateur.

La crèche du Dr Arokia Samy à Madras.
Photo M. Schneider

La nouveauté : Dieu craque pour une jeune fille de chez nous…

L’ange Gabriel vient visiter Marie, une fille de chez nous. En elle la Parole de Dieu se fait chair et Dieu prend un corps d’homme. Elle est enceinte. L’épouse du dentiste nous apporte son approche féminine. Marie sent que quelque chose de mystérieux se passe dans son corps. Pour en avoir le cœur net, elle part chez sa cousine Elisabeth, pour se renseigner dans sa famille. Au contact des autres femmes, elle va évacuer l’angoisse et s’ouvrir à la joie.

La crèche du Dr Arokia Samy à Madras.
Photo M. Schneider

En Inde, la femme enceinte vit dans la peur de ne pas pouvoir donner naissance à un garçon. Le garçon est toujours attendu et désiré. Il est une bénédiction, alors que la fille est une malédiction. « Elever une fille, c’est comme arroser le jardin du voisin » dit le proverbe. Aujourd’hui, l’Inde accuse un déficit de 35 millions de femmes à cause des infanticides et des avortements sélectifs. Le Dieu des chrétiens a valorisé Marie et la femme. Une révolution pour la mentalité indienne !
La famille Arokia a voulu réunir dans un même tableau Marie et Joseph. Aujourd’hui le divorce entre dans la culture indienne. Il faut sauvegarder l’unité du couple. Marie et Joseph portent ensemble le destin de la nouvelle naissance.

La nouveauté : bergers et Mages célèbrent la naissance…

Les bergers représentent les basses castes, les Mages les hautes castes. Dieu ne fait pas de différence entre pauvres et riches. Personne n’est exclu de son amour. La scène des bergers et des Mages illustre combien soncœur est grand et accueillant. Il n’y a pas de discrimination, les deux mondes coexistent et cohabitent. Les Mages symbolisent l’universalité du message de Dieu, il n’est pas réservé à une seule catégorie. La « Bonne Nouvelle » est annoncé à tous les hommes de la terre.

La crèche du Dr Arokia Samy à Madras.
Photo M. Schneider

Toute la famille Arokia est missionnaire.

Quand la crèche prend forme, c’est que toute la famille, Arokia Samy, son épouse et ses deux enfants, ont travaillé de longues heures en coulisses. Les enfants confectionnent les objets qui enrichissent la crèche, le papa et la maman ont mis au point le thème. En toute indiscrétion, j’ai posé la question de leur investissement financier… D’année en année un budget de 200 € est affecté à la crèche. Dans le contexte, la somme est conséquente quand on sait que le simple Indien gagne 1 € par jour. La famille Arokia a voulu être missionnaire à sa façon. Elle offre son espace et sa sensibilité chrétienne pour témoigner dans une fidélité à l’Evangile. « Vous serez mes témoins [3] … »

Terre d’Afrique Messager 2009-4