
Nouvelles de famille
Père Georges Klein
De Lomé à Saint Pierre
Vous savez déjà que je me trouve dans la maison de retraite des Missions Africaines à Saint Pierre. Cela a été une décision prise ensemble : ma famille, ma famille des Missions Africaines et moi-même. Oui ! J’ai quitté l’Afrique définitivement pour retrouver l’Alsace. J’ai laissé derrière moi des communautés, des amis, des collaborateurs, des paysages, un vécu de plus de 40 ans. Tôt ou tard il fallait le faire. Autant le faire lorsque l’on est encore quelque peu vaillant. Tout cela est devenu un souvenir qui m’est cher...
Revenu au pays, je ne reste pas inactif. Depuis le 1er septembre 2012, me voilà engagé par le diocèse comme prêtre coopérateur pour les deux communautés de paroisses de Scherwiller et de Châtenois : en tout, 9 lieux de culte. Je vais célébrer en paroisse les samedis et dimanches.
Lorsque le curé s’absente pour ses diverses occupations, je le remplace ; ceci concerne surtout les enterrements. Pour le reste du travail paroissial, je me considère comme novice et demande un temps pour voir, avant de m’engager plus avant.
Le 1er janvier 2013, je prends également la relève du Père Jean Founchot comme responsable de la communauté des Missions Africaines de Saint-Pierre. Je ne viens pas déranger ces personnes retraitées, mais seulement aider dans la mesure de mes moyens.
Ici, j’ai deux atouts supplémentaires. Mon frère Jean est avec moi et ma famille habite dans la région ; frères et sœurs sont mariés dans les villages environnants. Il y a même une habitude, inaugurée par mon oncle le Père Georges, et que je serai heureux de respecter : celle d’aller manger une fois par semaine en famille.
Père Gérard Bretillot
Adamavo, Lomé (Togo)
L’année 2012 a été marquée par plusieurs événements. Fin janvier nous arrivait du Ghana Michel Assorgoe, un confrère sma. Nous nous retrouvions à six confrères et nous avons pu mieux prendre en charge les sept communautés. Chaque confrère a la responsabilité d’une communauté, qu’il essaie de suivre le mieux possible. En plus, il prend en charge un service sur la paroisse, soit la catéchèse, soit les chorales ou la jeunesse... Personnellement, j’ai la responsabilité, avec un confrère, du groupe vocationnel. Je suis également chargé de suivre un peu les nombreux chantiers de construction.
A l’occasion des fêtes pascales, nous avons été très engagés dans la pastorale des sacrements et l’accompagnement des catéchumènes, qui sont très nombreux. La pastorale familiale continue à porter des fruits mais ce n’est pas toujours facile.
En avril et mai, nous avons eu la joie d’accueillir un groupe d’amis du Haut-Doubs. Nous avons passé de magnifiques moments ensemble. Ils nous ont apporté un bon bol d’air frais du pays, sans oublier l’excellent comté et le fumé.
Le 21 juillet restera marqué dans les annales de la paroisse Sainte Thérèse. Nous avions la grande joie de voir trois confrères sma togolais ordonnés prêtres. Ce fut une journée merveilleuse de joie et de convivialité. En septembre c’est un confrère togolais, Jean de Dieu, et un confrère italien, Luigi, qui venaient renforcer l’équipe après le départ définitif du père George Klein. Ce dernier partait en juin, après 43 ans de présence au Togo. Il a fait un travail magnifique et il va nous manquer car c’était un spécialiste des bibliothèques et de la fabrication des bougies.
Avec la rentrée 2012, le secteur d’Adamavo s’est modifié. Deux confrères ont rejoint Avépozo, deux autres ont la charge d’Adamavo et d’Afanoukopé. Moi-même, avec deux confrères et un stagiaire, je suis resté à Agodéké. Sur les sept confrères sma de la paroisse nous sommes de six nationalités différentes. Notre principal travail consiste à bien nous entendre et à bien nous comprendre.
Cette année 2012 a vu progresser les nombreux chantiers de la paroisse. L’église Notre-Dame du Perpétuel Secours d’Agodéké, sous l’impulsion du Père Georges Klein, a désormais un toit et est fière de son magnifique clocher. Elle envisage prochainement d’installer l’électricité. Après Agodéké, c’est la communauté chrétienne Notre-Dame de la Trinité d’Afanoukopé qui s’est mobilisée. Elle a terminé le chaînage et la couverture sera faite avant Pâque. Ces deux églises peuvent accueillir chacune 1200 fidèles.
Avec l’argent du Rotary Club de Pontarlier, nous avons pu fabriquer 200 tables-bancs pour les écoles du secteur. Inutile de vous dire la joie des élèves !
Le 12 août je partais en congé. J’étais invité à fêter les 80 ans de ma sœur Odette et les 70 ans de ma sœur Michèle. Quelle joie de replonger dans l’ambiance familiale ! J’en ai profité pour rendre visite aux nombreux amis qui sont toujours motivés pour la mission.
Père Jean Perrin
Sotouboua, (Togo)
Les fêtes se suivent. L’an dernier c’était mon jubilé de soixante ans de sacerdoce ; cette année celui du soixantième anniversaire de mon arrivée au Togo. Autant d’occasions de rendre grâce à Dieu. Cette année a été assombrie par le décès de ma belle-sœur. Un merci tout spécial aux Missions Africaines qui sont venus en nombre aux obsèques. Tout dernièrement, j’ai été opéré de l’appendice, sans problème, mais je traîne encore un peu les jambes.
L’école primaire est achevée et a débuté par le CP. Mais ce que je regrette, c’est que la direction a supprimé le clos d’enfants. J’espère que l’année prochaine, on pourra reprendre. Le sanctuaire a été fréquenté plus que prévu [1]. Dommage que nous n’ayons pas encore de structures d’accueil !
Et voilà qu’un grand chantier se prépare : une « université catholique ». L’évêque a donné son accord, mais a exigé un terrain de 10 ha. Il a été trouvé et a été payé. Nous envisageons trois facultés pour l’instant : les Lettres, l’Anglais et l’Economie.
Il faudrait que nous puissions réaliser cette année le bloc pédagogique de 12 classes, d’un montant de 160.000 €, la maison des Pères (64.500 €) et l’acheminement du courant (37.500 €). Devront suivre un forage, la clôture, un internat, sans compter le matériel. J’y tiens beaucoup ; ce sera sans doute ma dernière réalisation. (1.12.12)
Père Bernard Bartouillet
« Village Renaissance », Yaokopé (Togo)
Une année se termine, une Nouvelle Année est déjà à notre porte... St Augustin fait cette remarque originale : « Toute année est bonne ; elle ne peut être que bonne, puisque c’est Dieu qui nous la donne. » Donc, à nous de la faire bonne !
Depuis octobre, j’ai donc rejoint le Village « Renaissance » après un congé plein de soleil, de rencontres et d’amitié partagée. Et la joie de retrouver ici tant d’amis, tous nos animateurs qui ont tenu bon dans leur service d’accueil et d’accompagnement auprès de nos frères « Renaissants ». Accueillir des ex-détenus pour en faire des hommes nouveaux ? Du temps perdu, un rêve irréalisable, diront certains. Et pourtant ! Regardez : quand un garçon retrouve le sourire et la joie de vivre, se remet au travail avec ardeur, retrouve la confiance en soi et dans les autres..., est-ce du temps perdu ?
Seuls ceux qui en sont les témoins ont déjà leur récompense ! Avouons-le : quelle accumulation de préjugés circule ! Et tous ces regards sans pardon ! Me revient en tête ce mot de Paul Baudiquey : « Bénis soient les regards assez tendres, assez fous, assez vrais, pour me donner le cœur de m’espérer encore... Les vrais, les seuls regards d’amour sont ceux qui nous espèrent, qui nous envisagent au lieu de nous dévisager. »
Les activités du Village continuent dans différents domaines, toujours dans le but d’arriver à se prendre en charge au maximum : lapins, porcs, 2000 pondeuses, pintades, agoutis, jardins et plusieurs cultures pour le maïs, le mil... Chacun s’initiant ainsi avant de repartir avec une connaissance pratique. Les visites à la prison, y compris le service religieux, sont aussi des temps forts de rencontres et d’échanges, surtout quand il s’agit de renouer les liens avec la famille. Mais rien n’est petit quand il y a l’Amour.
Père Claude Rémond
17 jours au Togo
On ne parle que de crise en Europe ; en Grèce, en Espagne, en France, ça va mal... On voit tout ce que l’on a perdu mais personne ne se rend compte de tout ce que l’on a encore ! Gamins à 200 mètres de l’école qu’on vient chercher en voiture, TV écrans plats, téléphones portables, doubles vitrages, sécurité sociale, retraites, etc. etc.
J’étais 17 jours au Togo pour revoir mes anciennes missions et le pays. Beaucoup de choses ont changé et évolué mais j’ai pu constater l’abîme qui nous sépare encore. Ce voyage m’a surtout appris à relativiser nos « misères ». Pour ce faire, je ne donnerai que deux ou trois exemples.
Le Togo est un pays de jeunes : 40 % ont moins de 16 ans ! A la sortie des classes, tout ce petit monde rentre à pied chez soi, rarement à bicyclette, et certains jusqu’à 5 ou 6 kms.
Les jeunes adultes ne trouvant pas de travail, même bacheliers ou universitaires vivent de petits boulots : taxi-motos, vendeuses d’eau en sachets plastiques remplis aux fontaines, transport de fruits ou de marchandises à la force des bras sur des espèces de brouettes appelés kekevi…
L’exemple qui m’a le plus scandalisé, c’est celui de mon ancien cuisinier, Raphaël. Quand j’ai été nommé Régional en 1972, je l’ai tout de suite déclaré à la sécurité sociale pour assurer, croyais-je, son avenir. Nous avons payé pendant 40 ans les cotisations pour lui. Et maintenant, savez-vous ce qu’il touche comme retraite ? 2689 Francs CFA par mois, ce qui fait.... 4€10. Vous lisez bien, il n’y a pas d’erreur, 1 € valant 655,90 Fr. CFA. Allez vivre avec cela ! Bien sûr, en Afrique on dépense beaucoup moins que nous pour le... chauffage !
Autre chose : les églises sont pleines. Le matin, après le chant des coqs et les appels des muezzins à la prière à 3h30, c’est les chants des fidèles et les messes de 5h, y compris le dimanche avec trois messes dans chaque église. Nous avons des choses qu’ils n’ont pas, ils ont des choses que nous n’avons plus.
Le meilleur médicament contre la sinistrose et la désespérance c’est encore l’entraide et le partage auxquels nous invite ce temps de Noël. Le Deutéronome [2] nous dit comment : « Puisqu’il ne cessera pas d’y avoir des pauvres au milieu de vous, je te donne ce commandement : tu ouvriras ta main toute grande à ton frère, au malheureux et au pauvre. » Ouvrir ses mains et son cœur, personne n’est trop pauvre pour ne pouvoir le faire, c’est cela être frères.
Père Pierre Kunegel
Kombolokoura (Côte d’Ivoire)
Cette nouvelle année qui approche à grands pas sera l’année de mon congé. Si Dieu le permet, je célébrerai la messe de mes 50 ans d’ordination à Artzenheim, le 7 juillet prochain. Ce sera le jour anniversaire de ma première messe. Ceux d’entre vous qui le souhaitent pourront participer à cette messe d’action de grâces qui sera suivie d’un apéritif.
La paroisse de Kombolokoura, se réveille tout doucement de sa léthargie. Comme ils avaient l’habitude d’avoir la Mission à leur service, avec différents avantages, ils ont été à l’épreuve pendant des années. Ils ont mis du temps à comprendre qu’ils avaient fait fausse route. Le comité paroissial de la nouvelle Mission de Dassoungboh a tenu à venir « réveiller » le Conseil paroissial et les chrétiens de Kombolokoura, si bien que la communauté reprend un peu de dynamisme et, ce qui est encourageant, prend de petites initiatives !
La construction de la chapelle de plus de 300 places que j’avais commencée fin 2011 à Komboléo, au nord de la paroisse, est terminée depuis la mi-juillet. Situé à 21 km de Kombolokoura, je n’ai pu rejoindre le village à cause de la mauvaise piste défoncée et noyée par une saison de pluies plus qu’abondantes. J’ai donc profité d’un passage à Korhogo pour faire un grand détour de 106 km aller-retour pour atteindre le village et célébrer une messe dans ce nouveau lieu de culte joliment décoré.
Il est vrai que la catéchiste Christine, sage-femme au petit dispensaire-maternité local, motive bien la population. J’étais heureux de voir que cette communauté s’est bien développée. On y a dénombré 149 présences ! Christine a, elle aussi, formé des communautés de base et une Caritas assez dynamique pour un village de brousse. Elle a regroupé un bon nombre d’enfants dans les CV-AV (Cœurs Vaillants - Âmes Vaillantes). A la fin de la messe, elle m’a demandé d’accueillir dans la communauté une cinquantaine de nouveaux, dont beaucoup de jeunes.
Pour le moment, je tiens à ce que les deux paroisses ne coupent pas le cordon ombilical qui les relie encore et qu’elles continuent à se soutenir et à créer une émulation entre elles. C’est ainsi que, grâce à Christine, nous avons appris qu’un certain Paul, déjà âgé, souffrait de la prostate et qu’il portait la même sonde depuis juin dernier ! Il avait une vieille ordonnance pour une échographie, mais personne, dans sa famille, ne voulait prendre cela en charge. Christine est allée les voir et les a sollicités en leur disant que les chrétiens allaient les aider. Nous sommes donc allés à l’hôpital. Il fallait voir le bonheur dans les yeux de ce brave homme, malgré son inquiétude devant l’inconnu. Nous avons appris que son affection était cancéreuse. Le docteur lui a prescrit une ordonnance pour des comprimés de chimio. Les Caritas des deux paroisses se sont alors mobilisées pour lui permettre de suivre son traitement. C’est un bel exemple de solidarité, qui aura sûrement un impact sur le reste de la population.
Je n’ai jamais vécu un tel changement subit et inattendu dans aucune des missions où j’ai servi. A 77 ans, c’est pour moi une grande joie d’être témoin de cet élan que rien ne laissait présager et de pouvoir l’accompagner. C’est aussi une grande grâce d’être témoin de ce souffle de l’Esprit sur ces communautés. Je suppose que Notre-Dame de Lourdes y est pour quelque chose.
Tout en animant ces deux paroisses avec leurs 37 villages, d’autres activités m’attendent. Tout d’abord, je réhabilite une petite maison pour pouvoir accueillir et former des jeunes qui désirent s’engager pour être catéchistes.
Dès que les pistes ont commencé à être un peu praticables et que les terres ont été asséchées pour atteindre le sable, après une très forte saison de pluie, nous avons débuté la construction d’un lieu de culte dans le village du catéchiste principal de la nouvelle paroisse. En effet, il a beaucoup de personnes âgées qui ne peuvent guère se déplacer pour les célébrations dominicales. Ainsi, après son service à la paroisse, il pourra desservir sa communauté, qui sera à l’abri du soleil et de la pluie.
Dans le même temps, nous avons commencé les travaux pour la construction d’une école à Nidyon. Trois villages, distants de 8 et 10 km de l’école la plus proche, sont concernés. Pour éviter les longs trajets journaliers à leurs enfants, les parents ont décidé de commencer la construction d’une école et ont embauché un maître bénévole. La construction sera leur affaire. La Mission y participera selon ses moyens. En attendant, ils ont confectionné quelques briques en ciment et construit un abri en briques de terre, couvert de paille, pour accueillir les enfants. Les 58 enfants, de tout âge, sont assis sur de simples bancs. Lorsqu’ils doivent écrire sur l’ardoise, ils se mettent à genoux derrière leur banc qui leur sert alors de pupitre !
Dans la foulée, j’ai décidé de renouveler la toiture d’une chapelle plus ancienne, construite au temps de mes prédécesseurs à Wayéri. La charpente est trop faible pour résister longtemps à de fortes tornades.
Pour terminer, je vous redis ma reconnaissance pour toute l’aide matérielle et spirituelle que vous avez procuré à la Mission depuis 50 ans ! Soyez sûrs que les différentes communautés vous sont très reconnaissantes.
Dernières nouvelles
Ici, à Dassoumblé, Noël s’est bien passé. A 20 h, grâce à un petit groupe électrogène emprunté, les organisateurs ont projeté une vidéo en sénoufo sur la vie de Jésus, puis c’était un repas pour tous. Les catéchistes et le Père ont eu droit à un plat de hors d’œuvres en supplément !
Les organisateurs voulaient faire la célébration à l’intérieur de la chapelle de 350 places (quand on est bien serré), mais ils étaient bien trop nombreux. A mon avis, entre 400 et 500 personnes ! La messe s’est terminée après 1h. Je suis rentré me coucher vers 2h30. Les "fêtards" ont continué jusqu’au matin par des petites scènes sur la naissance de Jésus, des cantiques, des prières et des animations diverses. A 7h, ils ont organisé une célébration… sans moi, puisque j’avais la messe à Kombolokoura pour les personnes qui ne pouvaient pas se déplacer. Puis ils se sont dispersés après 9h.
Vendredi, j’organise un repas, chez moi, pour les catéchistes et les responsables de la communauté des deux paroisses. Dimanche prochain, ce sera le pèlerinage à la Ste Famille, dans la chapelle de la nouvelle paroisse, et je bénirai les petits enfants devant la statue de la Ste Famille en souvenir des Sts Innocents. Le dimanche suivant, ce sera la fête patronale de Notre-Dame de l’Épiphanie à Nidyon.
Père Bernard Rauch
Nouvelles du pays des « cacaoyers » (1)
Depuis deux mois je suis donc avec un jeune prêtre originaire du nord Nigeria à la paroisse de Doba, au cœur de la forêt, à une petite centaine de kilomètres au nord-ouest de San Pedro, la troisième ville de Côte d’Ivoire et le deuxième port du pays. La paroisse s’étend des confins de la ville jusqu’au parc national de Tai, immense masse forestière qui borde le territoire qui nous est confié sur plus de cinquante kilomètres. La situation géographique du village fait qu’il y pleut presque tous les jours. La route que nous empruntons a été ouverte par les exploitants forestiers et les planteurs ont profité de ces saignées dans la forêt pour défricher et faire des plantations de cacao. C’est donc une piste défoncée, pleine de trous et de marres de boue, praticable uniquement par des 4X4 équipés d’un puissant crabot, qui nous relie au reste du monde.
La paroisse compte plus de quarante communautés composées de trente à plus de mille membres. Les chrétiens sont pour la plupart des immigrés venus du Burkina-Faso, du nord-est et du centre de la Côte d’Ivoire : mossis, koulangos, baoulés.
Doba compte sans doute plus de 10 000 habitants. Le village situé à 9 km au sud, où se trouve une communauté de sœurs africaines, a plus de 20 000 habitants ; un autre, situé à 12 km au nord, toujours sur la même piste et où se trouve également une autre communauté de sœurs, a plus de 15 000 habitants. Il n’y a pas d’électricité, quelques dispensaires, très peu de constructions en dur si ce n’est les mosquées et les églises des différentes confessions chrétiennes du pays.
Nous circulons à moto pour visiter les villages. On part le mardi et on revient le vendredi si on doit célébrer le dimanche à la paroisse, ou le dimanche soir si on célèbre en brousse. Jusqu’à ce jour, je mets une heure pour faire 10 km ; il faut donc compter des heures et des heures de route pour rejoindre la paroisse quand on quitte le dernier village visité. Comme on revient dans l’après-midi, immanquablement il pleut des cordes et des cordes, ce qui rend la conduite plus que périlleuse.
Des abords des villages aux villages voisins, tout est planté de cacaoyers. Les montagnes, les collines, sont couvertes de plantations. Il n’y a plus de forêt et les gens me disent que les plantations s’étendent ainsi jusqu’à la frontière du Libéria, qui se trouve à 80 km à l’ouest de notre paroisse. La vie des gens est rude, la plupart vivent dans des cabanes en banco couvertes de toiles plastiques renforcées par des branches de palmiers.
Les petits camions KIA, de fabrication sud-coréenne, sont les seuls à rouler sur ces pistes. Ils vont chercher les sacs de cacao chez les planteurs pour les amener dans les centres d’où ils seront acheminés vers les usines de San Pedro. Le travail dans les villages est intéressant ; le seul problème, c’est de pouvoir accéder aux villages sans trop de casse.
Les gens qui viennent prier arrivent presque tous des campements disséminés en brousse et ils se regroupent au centre, là où ils ont construit une chapelle. Ils sont vraiment courageux. Presque partout, ils ont construit des écoles en banco, et des bénévoles, qu’ils paient, enseignent à leurs enfants. L’essentiel de notre travail est donc de visiter ces villages, sans se focaliser sur les difficultés de la piste. Dans les zones montagneuses, vers le village appelé Ste Marie, la piste va à l’assaut des collines en ligne droite. Quand tu es au pied de la côte, tu attrapes le vertige. Tu te dis : « Comment vais-je arriver là-haut ? » Et surtout : « Comment vais-je pouvoir la redescendre ? » Enfin, Dieu est grand, et il nous permet de passer les ponts de fortune, de franchir les marigots et les mares de boue, d’escalader et de dévaler les pentes sans trop de problème.
Nouvelles du pays des « cacaoyers » (2)
La paroisse de Doba, où je suis arrivé dans les premiers jours d’octobre avec un jeune confrère originaire du nord Nigeria, est coupée du monde, perdue au milieu de la forêt, ou plutôt des plantations de cacaoyers et d’hévéas, car la vraie forêt a disparue. Il reste fort heureusement l’immense forêt de Tai, qui borde la partie ouest de la paroisse et qui nous donne des pluies abondantes.
Les difficultés viennent de l’état des pistes. Il n’y a pas de routes et seuls les 4X4 peuvent franchir les nombreux obstacles : côtes aux pentes abruptes glissantes comme une planche à laver, fleuves de boue collante comme de la glue, énormes trous d’eau boueuse et j’en passe... La paroisse possède un 4X4 Nissan que nos confrères italiens nous ont laissé et que l’on bichonne car c’est lui qui nous permet de rejoindre le monde extérieur. Un prêtre du diocèse de San Pedro nous a proposé de prendre un jeune chauffeur en attendant que nous ayons le permis ivoirien et que, surtout, nous ayons la maîtrise de la piste. Il ne faut pas vouloir jouer au Rambo quand on n’en est pas capable.
Pour le travail, nous utilisons des motos tout-terrain de fabrication chinoise que nous avons eues pour 1025 euros chacune (dédouanement compris). Peu à peu, j’apprivoise et la moto et la piste ; il faut aller doucement et ne pas griller les étapes, car il s’agit de durer. L’essentiel du travail consiste à visiter les villages et les campements. Le terme de village n’est pas très approprié car, en réalité, ce sont des villes de 10 000 à 25 000 habitants. Seulement, comme il n’y a ni routes carrossables, ni eau, ni électricité, on parle de villages. Quand on voit les conditions de vie dans ces collines et montagnes couvertes de plantations, on ne peut qu’admirer le courage de ces gens qui ont quitté les savanes du centre et du nord-est de la Côte d’Ivoire ou celles du Burkina-Faso pour venir cultiver ici. Il y a quelques autochtones, les Bakwé, qui vivent ici depuis des siècles et qui ont donné le nom aux principaux villages de ce vaste territoire. Ce sont eux qui attribuent aux uns et aux autres des parcelles de terre.
S’il pleut énormément ici, à Doba, il n’en va pas de même à quelques dizaines de kilomètres plus au sud et à l’est. La sécheresse se fait sentir, suite au déboisement les pluies se font plus rares. Si, par malheur, la forêt de Tai venait à disparaître, on pourrait dire : finies la pluie, la boue et les mauvaises pistes, mais aussi finis le cacao et l’hévéa.
La paroisse compte plus de quarante communautés composées de trente à plus de mille membres. Les chrétiens sont pour la plupart des immigrés venus du Burkina-Faso, du nord-est et du centre de la Côte d’Ivoire : mossis, koulangos, baoulés.
Chaque communauté chrétienne a une église ou une chapelle. Nos confrères italiens ont construit des dizaines d’églises en dur de 400 à 600 places chacune. Ils ont même aménagé les structures de trois futures paroisses.
Pour nous, le travail est relativement facile ; les seules difficultés viennent des déplacements. Ce qui est regrettable, c’est qu’à cause de l’état des pistes, on ne peut pas visiter de façon régulière chaque village. Si Dieu nous donne la santé, tout ira bien. Il faut ménager sa monture et bien doser ses efforts afin de durer. Nous vivons aujourd’hui ce que connaissaient nos anciens, il n’y a donc rien de bien nouveau. Ils ont pu faire le travail, à nous de le continuer sans état d’âme. Il est certain que lorsqu’on voit l’accueil des gens dans les villages et les campements, on oublie vite les fatigues du chemin et on se dit que ça vaut la peine de partager avec eux leur vie laborieuse.
Père Ernest Klur
Paroisse Sainte Rita à Daloa (Côte d’Ivoire
Extrait des « Nouvelles sma de la région Côte d’Ivoire, n°4, décembre 2012 »
Le Père Ernest Klur a passé 4 ans dans la paroisse de Tiémé (diocèse d’Odienné) en milieu musulman. Le dimanche, il a une trentaine de personnes à la messe, mais il constate que maintenant les villages Senoufo s’ouvrent au christianisme. Il s’est mis à la disposition du DFGG (District en Formation Golfe de Guinée) et après Noël il quittera Tiémé pour ouvrir une nouvelle paroisse au diocèse de Daloa : Sainte Rita.
Les voies de Dieu sont impénétrables… Je viens de passer mes trois premières nuits à Zakoua, puis deux jours à Saïoua, ancien fief des SMA (qui va peut-être le redevenir !) pour aider cette grande paroisse pour les fêtes de Noël. Le 4e dimanche de l’Avent, j’ai été présenté par l’Evêque Monseigneur Maurice KONAN à la paroisse Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, territoire sur lequel se trouve la paroisse sma. Le Père Nelson, Supérieur du DFGG, le Père Paulin ainsi que le Père Jean-Louis Théron, chargé d’aider le DFGG dans ses différents projets, sont venus visiter les lieux en mon absence ; ils ont apprécié l’endroit et les constructions. Dans le secteur de Saïoua, sept hectares sont prévus pour les hévéas et sont en voie d’achat.
La pastorale pourra commencer après qu’on aura fait le partage du territoire et des villages. Je n’aurai jamais habité un aussi beau presbytère, dans un lieu calme et paisible : électricité solaire de 1300 Watt et eau (citerne de 1500 litres). Tout cela fonctionne à merveille, avec garantie à l’appui. Ma santé est excellente et je suis bien entouré, avec notre gardien Pierre et mon auxiliaire paroissiale « Sœur » Monique qui s’apprête à devenir membre honoraire sma. Il y a aussi une nièce de Sœur Monique et Fanny, un enfant de deux ans, qu’elle a adopté voilà 16 mois.
Restent des dépendances à construire : magasin, apatam pouvant servir de chapelle. En attendant, nous commencerons par célébrer dans le salon ou sous l’auvent arrière (25m sur 5m). Sainte Rita fera le reste, avec notre participation de « douleur, douceur et ferveur ».
Abbé Germain Coulibaly
Paroisse de Kong (Côte d’Ivoire)
Voilà déjà un an et six mois que je suis rentré au pays pour de nouvelles fonctions. Je suis à présent pleinement engagé dans ma mission de curé de la nouvelle paroisse de Kong. La communauté s’est agrandie après les baptêmes de l’an dernier à Gbomandougou et l’arrivée impressionnante de fonctionnaires nouvellement affectés à Kong devenue Préfecture. Le 14 novembre dernier, en effet, nous avons assisté avec joie à l’installation du tout nouveau préfet de Kong qu’entourait les quatre sous-préfets de son nouveau département. Son épouse est musulmane, lui est chrétien catholique, ainsi que ses enfants.
Une bonne nouvelle : le 22 avril dernier, alors que je recevais l’évêque pour les confirmations dans la nouvelle paroisse de Kong, je lui ai présenté la maison qui me servait de presbytère, là où il a été reçu à déjeuner. Il a été tellement marqué par le caractère infect du bâtiment qu’il a tout de suite demandé que les travaux du nouveau presbytère commencent. L’entrepreneur qui a dirigé les travaux va me remettre les clés du tout nouveau presbytère qui comprend un bureau, 3 chambres, une cuisine, une salle à manger et un garage. Je tiens à partager cette joie avec vous. Finie l’humidité de l’ancien logement ainsi que les déchets des roussettes et chauve-souris.
Il nous reste, à présent, à achever notre église. Commencée en 1999 par l’ancien évêque, Mgr Kélétigui, l’église de Kong est un bâtiment de 400 places qui est juste couvert. Lors des événements politiques de l’an 2 000, la toiture a été brûlée… L’évêque l’a fait refaire ; en 2002, lors du déclenchement de la crise, elle fut à nouveau détruite. Lorsque Monseigneur l’a reprise pour la 3e fois, les fermes et les poutres n’étaient plus solides. Résultat : la toiture actuelle est en train de s’affaisser. Il nous faut donc la reprendre et continuer les travaux d’achèvement de cette église.
(10 décembre 2012)
Père Robert Wolff
Mwanza (Tanzanie)
Au sud de la Tanzanie, il y a eu une attaque d’une variété de corbeaux, comme dans le film de Hitchkock ! Les oiseaux fondaient sur les marchés chercher de quoi se ravitailler, même à l’intérieur des maisons si, par malchance, on avait oublié de fermer les fenêtres. On a dû organiser la chasse aux corbeaux, chercher leurs nids, détruire les œufs.
A nord, surtout dans la région de Kilulu, autre problème. De tout temps, on était habitué à entendre les hyènes « ricaner » la nuit, après avoir réussi à chiper un cabri. Voici que maintenant, c’est en plein jour que les hyènes attaquent les humains, parfois enlèvent les bébés laissés seuls un instant. On ne laisse plus les enfants aller seuls à l’école ou à faire les courses. Un matin, dans une salle de classe, les élèves ont eu la visite surprise d’une hyène ! Heureusement leurs cris l’ont mise en fuite.
Une paysanne cultive au champ, son bébé au dos. Une hyène gourmande lui tourne autour… La maman réussit à lui cogner la tête avec sa houe. De retour chez elle, la jeune femme trouve sa grand’mère blessée à la tête…
Chez nous les « sorcières » enfourchent des balais pour se déplacer. Ici, elles chevauchent des hyènes. C’est pourquoi les « sorcières » élèvent et nourrissent des hyènes. Cette année, la nourriture est rare. D’abord se nourrir soi-même. C’est pourquoi les hyènes cherchent ailleurs de quoi manger. Dans les villages, un repas par jour et l’on est chanceux !… La « tine » de maïs a plus que doublé, si on en trouve.